COMMENT LES MEDIAS PEUVENT-ILS NOUS AIDER A COMPRENDRE LES CHANGEMENTS ?
Sameer KERMALLI, Photographe TANZANIEN, nous fait partager, dans l’exposition PHOTOQUAI qui se tient en face du Musée Branly à Paris, son observation des fourmis et ce qu’il en retire comme « leçons de vie », comme il l’écrit lui-même.
« L’affluence est telle qu’il n’y a plus assez de place autour de la goutte. Les secondes grimpent sur le dos des premières dans le but d’attraper ce qu’elles peuvent. Or ce n’est pas par avidité qu’elles agissent de la sorte. Elles collectent de l’eau pour les retardataires qui n’en ont pas encore profité. »
L’image, dans son objet à nous faire percevoir, à nous faire éprouver, dépasse la pensée d’une réalité fragmentée par nos sociétés occidentales. Et cela, depuis le 18ème siècle, comme nous le rappelle Philippe DESCOLA dans « l’image et la nature ».
Ce dernier nous dit que « les enseignements, sur les traitements des images, sont rares. Elles sont séparées, selon leurs champs disciplinaires et dans des musées : Atlas botanique, machine et automates au CNAM, dispositif technique à la Villette, Faculté de médecine pour les corps,…etc. Une image excède par ses significations et ce que qu’elle provoque en nous. Elles ont toutes un effet, avec une capacité d’action, qui les fait se transformer en agents sociaux. Et ce, dans toutes les cultures. Elles ont pour fonction de mettre en relation et représenter un prototype réel ou imaginaire. Elles mettent en évidence des conventions qui nous apprennent sur la manière dont les humains conçoivent la discontinuité et la continuité. »
Ce n’est pas la seule façon de construire la représentation du monde. Les modes de socialisation, choisis par les humains, intègrent, la continuité et la discontinuité. Dans ce double mouvement : l’un physique, qui les intègrent ou pas, au groupe d’appartenance. L’autre mouvement, celui tourné vers l’intériorité, comme une fenêtre ouverte sur la différence, qui est à apprivoiser, peut émerger dans cet espace.
L’image, comme intermédiaire, touche, tout d’abord, à cette intériorité, dans la perception sensorielle, car elle est une vibration créée par le contact de l’œil, qui en est l’outil, avec un objet.
Elle va interpeller notre histoire, faire bouger le cadre, à travers le regard qui se déplace et que nous portons, pour la réactualiser. (Dans cette rétrospective, la réminiscence de ce qui est connu ou entendu, les anciens mots s’étiolent, perdent de leur puissance pour naître à autre chose qui n’est pas encore définie). Nous pouvons regarder, dix fois la même image, celle-ci n’aura jamais le même impact, la même consistance, la même couleur. L’intentionnalité de l’environnement déterminera ce qui fixera la réalité imagée, passée, dans une temporalité.
L’image, en tant que représentation de cette forme de réalité relative, nous met en distance avec le discours que l’on peut tenir sur elle et devient ainsi, autonome. C’est dans le mouvement naturaliste à travers BECON, DESCARTES, GALILEE, que l’on parle de révolution mécaniste pour traduire cette intériorité comme la continuité physique entre les humains, des autres objets du monde.
Ces photos, en elles-mêmes, n’appuient pas le discours, ni ne le soutiennent. C’est leur pouvoir d’évocation subjective, à l’auteur qui la transmet, à partir de son regard, qui peut nous relier à sa pensée.
Comment le discours sur l’image que l’on nous donne à voir, contribuent-ils à renforcer ou infirmer ce que l’on éprouve pour lui donner du sens ?
6 Octobre 2011 – modifié le 5 mai 2012.
Christine COURTY (Fondatrice)